Le mauvais procès du CDD : taxation des contrats courts, une double peine

Le CDD a mauvaise presse, cela fait longtemps qu’il est dans la ligne de mire des bien-pensants, des chevaliers des salariés, de gens formidables zappant 50% du problème… Le CDD serait l’instrument rendant possible la précarisation. Les patrons se jetteraient sur cette possibilité pour ne pas avoir à s’engager, le préférant de loin au CDI qui l’attacherait pour toujours, passée la période d’essai. Peu importe que celui-ci coûte plus cher (10% de prime de précarité sont à rajouter à la note), qu’il complique terriblement la gestion administrative des organisations (bah oui, un CDD, c’est plein de paperasse, ça ne se renouvelle qu’une fois, ça nécessite recrutement supplémentaire, ça sous-entend turn-over…). C’est à croire que les employeurs sont juste stupides !

Je ne vais pas vous la jouer X-files mais la vérité est ailleurs. Cette histoire de CDD est une grosse galère aussi pour les employeurs.

Alors une fois qu’on a dit que ce n’était pratique pour personne, qu’il n’y avait pas les salauds d’un côté et les victimes de l’autre, pourquoi le secteur du grand âge est-il super consommateur de CDD ?

Tout d’abord, il convient de relativiser. Sur 100% des emplois du grand âge, 80% sont des CDI et seulement 20% des CDD. Pas si mal. Et si on regarde de près, 90% de ces CDD sont des CDD de remplacement (merci au SYNERPA pour les chiffres).

Eh oui, logique : les missions du grand âge sont d’intérêt général, pas question de planter les gens faute de personnel présent. On compte sur nous pour l’indispensable !

Et si nos salariés s’absentent et même souvent, c’est qu’il y de bonnes et vraies raisons à cela ! Il convient de rappeler que nous sommes un secteur composé en quasi-totalité de femmes. Qui dit femmes, dit congé mat., congé parental, congés « enfant malade », etc. Si je milite pour une meilleure répartition entre les sexes afin que tout ne repose pas uniquement sur les mères, force est de constater que c’est encore nous les femmes qui sommes sur les deux fronts : travail/famille. Et du coup, pas d’autre choix que de s’absenter plus souvent que vous, messieurs !

Par ailleurs, la formation indispensable à la professionnalisation du secteur provoque là encore absences et remplacements. Et enfin accessoirement, nos salariés ont également droit aux congés payés et voilà encore: absences/remplacements.

Bref, nous n’avons pas recours aux CDD par choix, il nous est tout à fait indispensable pour assurer de manière continue l’assistance des personnes dont nous avons la charge. Nous demander d’y renoncer nous met encore (et comme souvent) dans une situation complètement schizophrène.

Une taxation des contrats courts (comme il en est question) ne résoudrait rien : pourquoi nous punir d’une situation que nous subissons déjà et sur laquelle nous n’avons pas de marge de manœuvre ?

Dans ce monde qui change, la forme CDI/CDD semble à bout de souffle. Si chacun voulait bien sortir de ses paradigmes, nous pourrions imaginer ensemble d’autres modèles plus justes et mieux adaptés à notre réalité.

Dafna